Généralités  

L'ozone est un polluant atmosphérique dont la concentration augmente régulièrement dans la basse atmosphère (troposphère). Contrairement à ses effets sur la santé humaine, qui commencent à être connus du grand public, ses effets sur la santé des plantes sont encore assez peu médiatisés. Pourtant, tout comme les animaux, les végétaux sont sensibles aux propriétés oxydantes de ce polluant.

La plupart des espèces sont sensibles à l'ozone, mais cette sensibilité s'exprime à de degrés très différents d'une espèce à l'autre et même entre individus d'une même espèce.

Les études expérimentales montrent que :

  • Les espèces les plus vulnérables sont le blé, le soja, la laitue, l'oignon, la tomate, le tournesol et certaines légumineuses comme le haricot.
  • La pomme de terre, le tabac, le colza et la betterave paraissent un peu moins sensibles, tout comme le maïs, alors que le riz et la vigne sont assez peu sensibles.
  • Des espèces comme l'orge, le seigle et quelques arbres fruitiers comme le prunier semblent bien résister à l'ozone.
  • Les effets de l'ozone sur les espèces « sauvages » restent encore assez mal connus.

 

Effets de l'ozone sur le fonctionnement des plantes

C'est principalement au niveau des feuilles que les plantes réalisent leurs échanges avec l'atmosphère, par de minuscules orifices présents à la surface des épidermes : les stomates. Les polluants atmosphériques diffusent à travers ces ouvertures vers l'intérieur de la feuille et leur impact est d'autant plus important que la quantité absorbée par la feuille est grande. La quantité de polluant absorbée dépend donc à la fois de la concentration en polluant dans l'air et du degré d'ouverture des stomates, qui est contrôlé par de nombreux facteurs physiques et physiologiques (rayonnement solaire, température, humidité de l'air, état hydrique, etc.).

L'ozone est un oxydant puissant, qui réagit directement avec les composés chimiques présents à la surface des cellules végétales (parois et membranes). Les produits issus de ces réactions sont encore mal connus, mais certains peuvent également être toxiques pour les plantes.

En réponse à ces oxydations, les impacts sur les végétaux sont de deux types :

Les dégâts : les dégâts foliaires sont les plus spectaculaires. Ils se manifestent par l'apparition de tâches ou de nécroses à la surface des feuilles. On les observe habituellement après un « pic » de pollution (période pouvant durer de quelques heures à quelques jours pendant laquelle la teneur en ozone de l'air atteint des niveaux assez élevés en milieu de journée). Cependant, l'impact sur le fonctionnement des plantes reste limité si seulement une faible proportion de la surface des feuilles est endommagée. Il existe des variétés de trèfle et de tabac très sensibles à l'ozone : des nécroses apparaissent à la surface de leurs feuilles après quelques heures d'exposition à l'ozone, même à des concentrations relativement modestes (de l'ordre de 25 ppb, soit 50 µg/m³). Ces variétés sont couramment utilisées lors d'opérations de biosurveillance de la qualité de l'air

Les dommages : ce sont des perturbations du métabolisme sans dégâts apparents, mais qui conduisent à une une diminution de la croissance ou de la productivité des cultures.

Les principaux dommages sont dus à :

  • La réduction de la photosynthèse. La photosynthèse est le phénomène par lequel les plantes utilisent l'énergie du soleil pour fabriquer une partie de leur biomasse (des sucres) à partir du gaz carbonique de l'air (CO2) et de l'eau prélevée dans le sol par les racines.
  • L'augmentation de la respiration. Une partie des sucres élaborés par la photosynthèse est consommée par la respiration pour fournir l'énergie nécessaire à la réparation des tissus abîmés par l'ozone.

Ces deux effets sont les principaux responsables de la diminution de la croissance des plantes.

 

L'accroissement de la sénescence des feuilles

La sénescence est le phénomène de vieillissement par lequel les feuilles jaunissent, sèchent et finissent par mourir. Sous l'effet de l'ozone, les feuilles vieillissent plus vite, et leur photosynthèse est donc moins longtemps efficace. Ceci conduit également à une diminution de la croissance et de la production des plantes.

Les impacts de l'ozone peuvent être très différents d'une plante à l'autre. Certaines espèces sont plus sensibles que d'autres, et pour une même espèce, certaines variétés sont plus sensibles que d'autres. Les origines de ces différences sont multiples. Le plus souvent, elles sont liées à une plus ou moins grande aptitude à mettre en œuvre des mécanismes de détoxication.

 

Impacts de l'ozone sur les plantes cultivées

Au cours de ces dernières années plusieurs programmes de recherche ont été initiés notamment en France et en Europe pour estimer les effets de l'ozone sur le rendement des plantes cultivées. L'approche la plus simple consiste à établir une relation statistique entre la perte de rendement et un indice d'exposition à l'ozone, l'AOT40, qui rend compte à la fois des fortes concentrations en ozone de l'air (supérieures à 40 ppb) et de la durée pendant laquelle les plantes sont exposées.

En appliquant cette méthode, on constate qu'au cours des quinze dernières années, le rendement du blé en région parisienne a été réduit en moyenne d'environ 10% par rapport à une situation non polluée.

Cette méthode est très approximative et devient inutilisable quand les conditions climatiques sont exceptionnelles, comme la canicule de l'été 2003. D'autre part, les nouvelles variétés de blé semblent moins sensibles à l'ozone que les anciennes, ce qui demande de réactualiser régulièrement ces relations empiriques. Cependant, les méthodes plus fines, qui consistent à calculer la dose d'ozone absorbée en tenant compte du degré d'ouverture des stomates des feuilles ainsi que les impacts physiologiques de l'ozone donnent des résultats du même ordre de grandeur.


Grâce à ces programmes de recherche, on dispose aujourd'hui de modèles d'impact très performants de l'ozone sur le fonctionnement et le rendement du blé, qui est la céréale la plus largement cultivée en Ile-de-France comme dans beaucoup d'autres régions françaises et européennes. Il existe également un modèle européen pour la pomme de terre, et nous développons en ce moment des outils d'estimation des impacts pour le maïs. Pour les autres espèces, on doit encore se contenter des relations empiriques entre rendements et AOT40. 

 

Impacts de l'ozone sur les végétations naturelles

Les forêts et la végétation "naturelle", c'est-à-dire non cultivée, sont également sensibles à l'ozone. On sait aujourd'hui estimer les impacts de l'ozone sur le fonctionnement des principales essences forestières comme le hêtre ou le chêne, ou encore le peuplier, au moyen de modèles analogues de ceux que l'on développe pour les plantes de grande culture.


En ce qui concerne les plantes "sauvages ", l'état actuel des connaissances est plus limité. La plupart des espèces n'ont pas été étudiées et on ne connaît les réponses à l'ozone que de quelques-unes d'entre elles. Même si quelques espèces paraissent aussi sensibles que les plantes cultivées (c'est notamment le cas du trèfle), il semblerait toutefois que la plupart soient assez tolérantes à l'ozone. 

 

Effets de l'ozone sur le géranium des bois : rougissement des feuilles.

 

 

Effets de l'ozone sur l'armoise.

 

 

 

Ozone, écosystèmes et biodiversité

Enfin, même si des programmes de recherche se mettent en place notamment sur les prairies, on n'a encore que très peu d'informations sur les impacts de l'ozone à l'échelle des écosystèmes. Les premiers résultats montrent que les degrés de sensibilité peuvent être très différents d'une espèce à l'autre. C'est pourquoi, la pollution de l'air par l'ozone peut modifier les relations de compétition entre espèces et altérer la composition des écosystèmes, affectant ainsi leur biodiversité.