21 janvier 2020. Les lauréats du "Challenge Microcapteurs 2019" ont été récompensés par les partenaires d’Airlab en clôture du workshop international sur les enseignements et les enjeux liés aux microcapteurs mesurant la qualité de l’air organisé par Airparif et l’AFD. Cette nouvelle édition ouverte à l’international a permis  aux fabricants qui le souhaitent de faire évaluer leurs solutions en disposant du savoir-faire d’Airparif et d’une évaluation indépendante composée par un jury d’experts français et internationaux. Il permet de ce fait  d’éclairer les utilisateurs potentiels entre l’adéquation et les performances du produit par rapport aux usages escomptés.

L’essor des capteurs connectés pour la surveillance de la qualité de l’air 

De plus en plus de projets d’expérimentation et d’innovation se développent autour de capteurs de qualité de l’air miniaturisés, visant à équiper villes, bâtiments, véhicules et citoyens. Pourtant il n’existe à ce jour pas de réglementation pour ces technologies qui représentent un marché en plein essor et qui suscitent l’intérêt des différentes parties prenantes : autorités, citoyens, ONG, acteurs économiques… quels que soient les continents.
Quelles sont les performances de ces appareils selon les usages ? Comment leurs performances évoluent-elles au cours du temps ?  Quelles ont été les évolutions technologiques depuis la dernière édition du challenge ? L’objectif de cette initiative est de valoriser les innovations tout en apportant des critères d’information et de choix pour les utilisateurs en fonction de leurs besoins par rapport à ces nouvelles technologies.
Pour l’AFD, ces questions sont omniprésentes dans bon nombre des pays émergents et en développement où elle accompagne les autorités. Dans ces pays, se conjuguent souvent des niveaux de pollution très conséquents, un dispositif de surveillance incomplet ou inexistant, et des ressources techniques et financières limitées : l’enjeu est donc de taille autour de ces équipements de mesure, qui fondent les politiques publiques d’amélioration de la qualité de l’air.

34 Microcapteurs passés au crible par les équipes d’Airparif pendant 4 mois, sous l’égide d’un jury international

À l’issue d’une phase de sélection, les 34 capteurs ont été mis à disposition par les fabricants volontaires et pour moitié par des entreprises étrangères.  Ces évaluations ont porté sur 44 paramètres en moyenne, 15 polluants ont été étudiés, et ce durant 4 mois dans la région parisienne (en laboratoire de métrologie, en mobilité dans des véhicules et sur des personnes, ainsi que sur des stations d’Airparif).  Ce qui représente plus de 50 millions de données traitées.  

Ces tests ont été menés sous l’égide d’un jury international composé des membres de la première édition (Airparif, ATMO Auvergne-Rhône-Alpes, ATMO Grand Est, CSTB, EMPA, FIMEA, OQAI et VEOLIA) auxquels se sont ajoutés l’Agence française du Développement, l’Organisation mondiale de la Météorologie, Engie et EDF, le Réseau des partenaires de recherche de la Région Île-de-France DIM QI², le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives et deux nouvelles associations de surveillance de l’air : ATMO Hauts-de-France et ATMO Normandie. Cette édition 2019 a été soutenue financièrement par l’Agence Française du Développement, EDF, ENGIE, le Réseau des partenaires de recherche de la Région Île-de-France DIM QI² et VEOLIA.
Chaque capteur concourrait pour un ou plusieurs usages (mesure en air extérieur ou en air intérieur, mesure fixe ou en mobilité, sensibilisation du public…) et était évalué suivant 5 critères : l’exactitude de la mesure, l’ergonomie, la pertinence des polluants mesurés par rapport à l’usage, le coût et la pertinence de la solution dans la catégorie concourut (encombrement, interopérabilité, prise en main, gestion des données). Les  résultats sont présentés sous forme d’un nombre d’étoiles allant de 1 (niveau le plus faible) à 5 (performance la plus élevée).

Les résultats de cette édition 2019 : Quatre capteurs lauréats du Challenge 2019 

4 capteurs commercialisés par 3 sociétés se placent en haut de l’affiche de cette seconde édition et sont les lauréats de ce challenge avec un résultat de 4,5 étoiles sur 5:

  • Dans la catégorie "Air Intérieur – Pilotage (IA-P)" : Le capteur E 4000NG commercialisé par NanoSense (France)
  • Dans la catégorie "Air Intérieur – Monitoring (IA-M)" : Le capteur E 5000RE commercialisé également par NanoSense (France)
  • Pour toutes les catégories  "Air Intérieur" que ce soit monitoring, sensibilisation et pilotage : les capteurs AIRVISUAL PRO+ commercialisé par IQAIR (Suisse) et LASER EGG commercialisé par KAITERRA (Chine)

 

Une amélioration des solutions proposées par rapport à l’édition 2018

Globalement, les résultats du challenge reflètent les différences de maturité du marché avec des performances selon les catégories d’usages assez similaires, mais des offres dont la qualité a progressé en un an.  Tout comme en 2018, l’évaluation de ces capteurs montre en effet que l’offre actuelle présentant les meilleures performances concerne les capteurs fixes et en air intérieur : tant pour des utilisations de sensibilisation à la qualité de l’air, que pour piloter et gérer la qualité de l’air à l’intérieur d’un bâtiment, Et cette catégorie, à laquelle appartenaient déjà les lauréats de 2018, a encore progressé avec des lauréats à 4,5 étoiles, contre 4 étoiles en 2018. 

De même, les solutions destinées à mesurer à des fins de surveillance réglementaire, d’évaluation de l’exposition personnelle, ou en mobilité, se sont elles aussi améliorées en termes de qualité des mesures et le nombre de polluants, mais demeurent un cran en dessous.

Les 34 capteurs testés lors de cette deuxième édition sont tous dotés d’un niveau d’ergonomie satisfaisant et en progression de plus de 10 % par rapport à l’édition 2018. Si la qualité des mesures varie d’excellente (pour le dioxyde de carbone en air intérieur) à peu satisfaisante, avec des différences selon les polluants pour un même capteur, une nette amélioration a été constatée sur l’exactitude qui a elle progressé en moyenne de plus de 30 % sur l’édition 2019. Par ailleurs, le jury souligne qu’il n’a pas observé de solution en dysfonctionnement majeur cette année, contrairement à la précédente édition.

Des améliorations possibles sur l’exactitude des mesures et le coût réel des solutions

Si la maturité technologique de ces capteurs fonctionne bien en air intérieur, les évolutions sont encourageantes en air extérieur mais la technique n’est pas encore prête pour répondre aux exigences réglementaires. Les solutions destinées à mesurer à des fins de surveillance réglementaire (Monitoring) d’évaluation de l’exposition personnelle, ou en mobilité, restent en effet à améliorer, notamment sur la qualité des mesures et le nombre de polluants suivis. Les conclusions du challenge, sur ce point rejoignent celles des travaux de l’Organisation Mondiale de la Météorologie, l’Organisation Mondiale de la Santé et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, pour qui les capteurs à faible coût ne sont pas un substitut direct aux mesures de référence, en particulier pour des enjeux règlementaires, mais ils représentent une source complémentaire d’information, à condition qu’un appareil approprié soit utilisé1[1].

Par ailleurs, concernant le coût et contrairement aux attentes, le calcul du coût global (achat et fonctionnement) sur trois ans montre que toutes ces solutions ne sont pas toujours des produits "low cost" avec un montant variant de près de 200 euros à plus de 17 000 euros. Et se pose également la question de leur impact environnemental, qui n’a pas été évalué dans le cadre du challenge, compte tenu de leur durée de vie (généralement 1 an à 18 mois). 

De plus, ces résultats sont représentatifs des capteurs testés mais ne peuvent pas nécessairement être extrapolés à d’autres lots, dont les performances ne sont pas toujours identiques. De même, en dehors de l’évaluation menée en laboratoire, ces résultats ont été obtenus avec des niveaux de pollution qui sont ceux d’une grande capitale européenne et les conditions météorologiques de l’Île-de-France. En air extérieur, des différences par rapport à ces résultats pourraient être constatées dans d’autres zones du globe comprenant des niveaux de pollution plus élevés et des conditions de température et d’humidité plus importantes. Avant toute mise en place d’un dispositif de ce type, une vérification du bon fonctionnement avec des tests métrologiques est préconisée.

Le critère métrologique est-il le seul paramètre à prendre en compte pour mettre en place un projet fondé sur ces dispositifs de mesure ?  Des expérimentations, de plus ou moins grande envergure, se développent en France et à l’international et sont présentées dans le cadre d’un workshop organisé par l’AFD et Airparif en amont des résultats du challenge. Au-delà de la performance métrologique individuelle des capteurs (telle qu’elle a été évaluée dans le challenge pour un lot donné), ces retours d’expérience mettent en évidence d’autres questionnements. L’expérimentation d’Urban Lab, de Paris&Co et la Ville de Paris, en partenariat avec AIRLAB, l’ADEME et la Caisse des dépôts[2] met notamment en avant l’importance « d’une évaluation de l’efficacité et de la durabilité des solutions proposées pour aller vers un achat responsable et soutenable » et recommande un arbitrage selon une approche en coût / bénéfice global.

Les évaluations disponibles gratuitement sur AIRLAB.

L’ensemble des résultats par capteur est mis librement à disposition sur le site d’AIRLAB conformément au règlement du Challenge afin que chaque potentiel utilisateur de capteur puisse éclairer son choix en fonction de l’utilisation escomptée de ces technologies. Ces évaluations sont disponibles en anglais et en français.

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Ce Challenge s’inscrit dans les activités d’AIRLAB, accélérateur de solutions, technologiques ou comportementales, pour améliorer la qualité de l’air.

L’écosystème AIRLAB regroupe une communauté qui s’engage pour améliorer la qualité de l’air : grandes entreprises, PME et start ups, institutionnels et collectivités, instituts de recherche, ONG… AIRLAB vise à identifier et stimuler de nouveaux leviers pour aller plus loin et plus vite dans la diminution de la pollution à Paris et en Île-de-France, quelles qu’en soient les sources. Et à évaluer leurs performances pour éclairer les décideurs et les utilisateurs.

AIRLAB a été créé par Airparif et ses partenaires fondateurs en septembre 2017, après une mission de préfiguration financée par la Région Île-de-France.

 

[1] Source : Low cost sensors for the measurement of atmospheric composition: overview of topic and future applications - Organisation Mondiale de la Météorologie (OMM), Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) – International Global Atmospheric Chemistry (IGAC), EMEP – mai 2018.

[2] Programme visant à expérimenter la mise en œuvre de projets concrets d’amélioration de la qualité de l’air extérieur et intérieur, innovants, viables économiquement, principalement sur la mesure, avec des microcapteurs, et la remédiation.